Au Vent du Nord...
Lundi 12 avril 2010, le vents du nord souffle et balaie la Normandie depuis deux jours.La température est de 6 degrés et je prends la direction des plages de la Côte de Nacre. J'abrite ma voiture derrière une dune plantée d'oyats . Je me dirige vers la plage. Arrivé au sommet de cette dune, le vent me gifle le visage et le bruit de la mer, pourtant éloignée et basse, me parvient comme un grondement. Elle est blanche de vagues. Je commence ma marche verts le nord est. La configuration des plages a été complètement bouleversée par les dernières tempêtes et les forts coefficients de marée. Il n'y a plus aucune pierre apparente ,ici. Tout a été ensablé. Je me demande ce que je vais pouvoir réaliser par ce sale temps et m'apprête, une fois de plus, à marcher dans le vent sans autre but, tout en profitant du spectacle de cette mer démontée.
Je franchis un premier épi rocheux, dont le but est de stabiliser le sable, puis un second derrière lequel je trouve "une réserve de pierres" que le vent n'a pas encore terminé d'ensabler. Au premier coup d'œil, j'évalue "la cueillette possible" et j'envisage de monter, ici, un petit cairn, en le situant tout en haut de la plage. Je commence à ramasser des pierres. Ce sont des plaquettes calcaires qui vont me permettre, vu leur forme, de monter le cairn de façon assez régulière. La " réserve" étant éparpillée, cela m'oblige à de nombreux va et vient pour le transport et malgré sa relative "petitesse", un mètre de haut, cela représente quelques centaines de kilos. Bien sûr rien à voir avec le cairn que j'élèverai le lendemain en campagne, où cette fois, le poids s'évaluera et tonnes. Une fois le travail terminé, je décide de dédier ce cairn au vent du Nord, qui m'accompagne dans cette installation. Je prends quelques photos et je m'éloigne. Je le regarde une dernière fois du haut de la dune aux oyats. Il est minuscule dans cette immensité et pourtant ce cairn dégage une certaine fierté d'être dans ce vent terrible. A l'heure où j'écris, il aura probablement été abattu à la marée haute qui le recouvrira. Sans vagues, il pourrait être recouvert et perdurer, avec les vagues de ce jour là, aucune chance, ses pierres seront éparpillées, roulées et déplacées au gré de la mer et c'est ce qui me plait dans cet art éphémère appelé le land art.
Roger Dautais
La Terre défaille entre les bras de mer bientôt improbables. Un enfant cherche un paysage ancien sous des galets froids, un enfant cherche un enfant.
Ce ne sont pas des perspectives de la Lune et de Mars si près qui nous éblouissent, mais la fragilité d'une heure sous un arbre dont nous recueillons la mémoire comme une pièce à conviction pour notre descendance qu'avec désarroi nous voyons poser le pied dans le vide.
La route désormais n'a d'issue que d'aller vers toi, ô Espérance.
Julie Stanton ( Québec)